REVUE DE LITTERATURES CLASSIQUES n.65 : le théâtre de Jean Mairet

C'est au début des années 1690 que le mythe d'Idoménée reparut en France sur la scène jésuite (à Rouen puis à Paris), juste avant que le Télémaque de Fénelon ne le remît en pleine lumière. Alors que trop souvent il n'est resté des pièces jésuites que le programme, un Idoménée représenté à Lyon, au collège de la Trinité, en juin 1700 nous est parvenu par une copie sur l'autographe conservée à la bibliothèque municipale de Grenoble. Écrite non pas en latin mais en français par le P. François Paulin, qui prolongeait ainsi la pratique du P. de Colonia, cette tragédie inédite et oubliée intéresse aussi bien la tradition poétique des jésuites que les efforts contemporains de restaurer un sublime à l'antique dans la tragédie française. Précédant de plusieurs années la tragédie homonyme de Crébillon, et au-delà de l'influence marquée du Télémaque alors dans sa nouveauté, elle offre un précieux témoignage de l'esprit du théâtre jésuite, de son économie morale comme de son intégration paradoxale du modèle racinien, à l'aube d'un siècle où l'Idomeneo de Mozart, sur un livret de l'abbé Varesco, allait consacrer la gloire de cette fable du sacrifice. L'édition propose une importante introduction ainsi que des annexes.