L'oeuvre poétique

Giorgio Caproni (1912-1990) est aujourd'hui reconnu en Italie comme l'un des poètes majeurs du XXe siècle ; cette position qui, dans son cas, a été plus lente à s'affirmer que pour ses contemporains et amis comme Mario Luzi ou Pier Paolo Pasolini, est aujourd'hui incontestable. Nombreuses sont en effet les études, thèses et commentaires consacrés à cette oeuvre. Ces études sont dues à des italianistes du monde entier, mais aussi à des figures aussi illustres que Giorgio Agamben, Pier Paolo Pasolini ou Italo Calvino. Caproni commence sa carrière à la fin des années 1930 et connaît une trajectoire d'une extraordinaire richesse formelle. L'unité de son parcours poétique est à chercher dans la mise en scène d'une « athéologie » rigoureuse : Caproni étant peut-être le poète qui a tiré les conséquences poétiques les plus radicales de la « mort de Dieu » élevée au rang de grand mythe moderne de la Négation. Musicien de formation, violoniste virtuose, il conçoit plusieurs de ses ouvrages comme des « livrets » d'opéras imaginaires, revient à la tradition de la canzonetta archaïque, ou détourne de manière parodique des litanies chrétiennes pour transformer les lieux de sa vie en éléments d'un « mythe personnel » : Livourne, sa ville natale, Gênes, sa ville d'adolescence et de jeunesse, enfin la vallée de la Trébie, en Lombardie, où il fut instituteur et rencontra son premier amour, Olga Franzoni, dont la mort prématurée fera du deuil un thème central de la première partie de l'oeuvre poétique. Du même lieu est originaire son épouse Rina, figure tutélaire à qui toute l'oeuvre est dédiée. Cette articulation du mythe personnel et d'un sens aigu de la responsabilité collective fait de Caproni l'égal de Montale ou de Luzi dans la poésie italienne moderne.