
Cairn
Kathleen Jamie (Auteur)
Editeur(s) : La Baconnière
Et si les baleines du monde transmettaient leur position aux satellites, comme les bateaux ? Il y aurait une application - appelons-la « Baleines Trafic ». On serait plus instruits, mais la patience ne serait pas récompensée. On renoncerait aux rencontres fortuites, au C'était quoi ? éberlué. Fini, les coups de chance, pour ainsi dire. Cela pourrait arriver un jour. Qui aurait pu imaginer que les bateaux seraient suivis à la trace par des machines dans l'espace ? Jadis, quand on sortait de l'estuaire et qu'on laissait le pilote, on était parti, et c'était peut-être mieux ainsi. Enfin, le grand large sous les étoiles !
Le grand large n'existe pas. Le monde n'est pas infini. C'est une chose acquise.
Dans ces textes secs et merveilleux sur notre relation au monde naturel, Kathleen Jamie déballe un crâne de courlis qu'une amie lui envoie, retourne au Musée d'Histoire Naturelle de Bergen où la baleine de Cuvier a fait son apparition aux côtés des sacs plastiques qui l'ont tuée.
Comme les pierres déposées par les marcheurs pour marquer leur passage éphémère dans le paysage, Kathleen Jamie amoncelle les histoires qui érigent ce recueil. Un ensemble solide dans lequel les textes se répondent et décrivent un monde qui marche peut-être vers l'abîme, mais toujours habité par la beauté.
Parvenue à l'âge du bilan, hantée par des souvenirs et en colère face à la marche du monde, Kathleen Jamie reste passionnément attentive aux beautés changeantes de la nature. Mais l'écosystème, le cycle éternel des saisons, autrefois si consolants pour ceux qui ont plus de jours derrière que devant eux, sont durablement ébranlés.